L'idéal

Seul un fou saurait dire, un fou ou un satyre
Le mal que je porte à cette infernale escorte
Arsenal de chair pâle auquel lasse à la porte
Pleure la puissante mitraille des soupirs

Je me suis brisé les reins à te tenir tête
Indomptable marbre que frappe le burin
Tu résonnes si creux sous l'ongle de ma main
Que j'ignore où se cache ton onde parfaite

C'est ton sourire, tes yeux et aussi ta joie
Qui tournoient, valse lente, à l'abri des curieux
Dans mon cœur décharné par ces versets véreux
Où ta bouche tout contre la mienne flamboie

C'est ta voix, maculée de la suie de l'oubli
Que j'entends là bruisser comme l'eau d'une grotte
Dans des colonnes bleues de rêves qui sanglotent
Et qui pour toujours dans la nuit lente s'enfuient

C'est tes seins opulents, artillerie inique
Me remémorant l'inaccessible attirail
Où se perdent mes cris dans la vaine bataille
Contre cet idéal à l'envie sardonique

C'est tellement de choses et si peu à la fois
Que je crache des vers comme on crache de fureur
Et me demande si ce fouet là, ma foi
N'interdit pas à mon cœur la voie du bonheur