Je ne suis pas un saint

Je ne veux pas mourir
Tel un patriarche à la barbe fleurie
Entouré des siens et de sérénité
Et qui meurt calmement
Un soir de printemps
Dans la sagesse
Et la douceur

Je ne veux pas mourir
Dans le calme et la tranquillité
Toute mort est atroce
Et tout sommeil amer
Je veux le crier
Je veux le hurler
A la face des sages
Et des bien-pensants
Qui vont dans le soir
A petits pas
Dégoulinants de componction
Et d'hypocrites précautions
Je ne suis pas un sage
Je ne suis pas un saint
Je ne suis pas un prophète
Je veux hurler dans la nuit
Sabre au clair
Et chevauchant sur les chevaux de la mer
Je veux hurler à la vie
Je veux saigner à la face du monde
Je veux brandir mes plaies
Comme des étendards
Je refuse de mourir
Je hais la mort
Je hais ma mort
Il n'y a ni Dieu
Ni au-delà
Ni en deça
Dieu est mort et bien mort
Les Paradis n'existent plus
Labourés par les rockets des croyants enturbanés
Z'ont sombré dans les enfers
De la vie médiocre et quotidienne
Je veux le hurler à la face des jours
On ne revient jamais du pays des morts
D'ailleurs il n'y a pas de pays des morts
IL n'y a rien
Il n'y a plus rien
Que l'anéantissement ultime
De tous nos espoirs
De tous nos souvenirs
De tout ce que nous ne fûmes pas
De nos larmes
Et de nos joies
De nos mensonges
Et de nos vérités
De nos élans
Et de nos défaites
Nous nous vidons
D'un seul coup
Et tout ce que nous savions disparait
Aspiré par le néant
Le monde se fige
Puis cesse d'exister
Toute mort est la fin du monde
Et il ne reste plus rien
Ni rire
Ni sensation
Ni savoir laborieusement accumulé
Ni musique
Ni désir
Ni souvenir de la petite pluie
Qui tombait sans cesse sur Brest ce jour-là
Rappelle toi
Tout cesse
Pour toujours
Les vents cosmiques peuvent bien
Balayer les cieux
Les mondes et le reste
Les villes brûler
Les continents s'engouffrer au fond des océans
Nous ne le saurons pas
Je ne suis pas un sage
Je ne veux pas de paroles douces
Je veux que l'on crie avec moi
Que nous hurlions tous dans la nuit
D'obcènes obcénités
La mort me déchire
Et je hurle
Je veux vivre encore
Vivre toujours

Je ne suis pas un sage
J'aime les jeunes pages
Et les jeunes seins
Je ne serai pas un patriarche exemplaire
Et soumis
Qui le soir venu
Bénit sa couvée
J'emmerde la mort

Et dîtes le lui de ma part !

Invité

IL ne faut pas non plus que l'appréhension de la mort soit une fuite, sinon il n'y a plus de vie sinon de recourir dans l'obsession de l'échappatoire...

Pour moi, ce n'est pas une appréhension, mais plus une révolte, un combat. Une lutte pour la liberté et contre la soumission. Un peu dans le sens de ce que développait Camus, dans l'Homme Révolté. Contrairement aux fachos qui criaient "viva la muerte ! ", moi je crie que j'emmerde la mort et que vive la vie !