SOURCE DE POESIE
Pour tous les amoureux de la poésie et des mots, ce forum héberge de très belles plumes du net. Joignez-vous à nous pour que vivent les mots.
Artistes dans l'âme, venez partager vos textes et faire de jolies découvertes, dans le respect des autres et de notre charte...

Toute l'équipe de Source de Poésie vous souhaite une belle visite.
SOURCE DE POESIE
Pour tous les amoureux de la poésie et des mots, ce forum héberge de très belles plumes du net. Joignez-vous à nous pour que vivent les mots.
Artistes dans l'âme, venez partager vos textes et faire de jolies découvertes, dans le respect des autres et de notre charte...

Toute l'équipe de Source de Poésie vous souhaite une belle visite.
SOURCE DE POESIE
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.


Source de Poésie, partager les mots, les maux, les émotions...
 
AccueilDernières imagesS'enregistrerConnexion

Bienvenue à vous à notre Source Poétique... Toute l'équipe vous souhaite la bienvenue chez vous.

Le Deal du moment :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à ...
Voir le deal

 

 Le bateau ivre - Rimbaud

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Phileau
Marin d'eau douce



Masculin
Nombre de messages : 18
Loisirs : Poésie Photographie Théâtre
Date d'inscription : 17/03/2010

Le bateau ivre - Rimbaud Empty
MessageSujet: Le bateau ivre - Rimbaud   Le bateau ivre - Rimbaud Icon_minitimeMer 24 Mar - 15:29

Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus tiré par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J'étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands et de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages
Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots !

Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,
L'eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : Je sais le soir,
L'aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelques fois ce que l'homme a cru voir !

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très-antiques
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

J'ai suivi, des mois pleins, pareilles aux vacheries
Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux des panthères à peaux
D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !
Des écroulement d'eau au milieu des bonacees,
Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés de punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instant.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d'ombres aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

Presque île, balottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabotteurs aux yeux blonds.
Et je voguais lorsqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir à reculons !

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repéché la carcasse ivre d'eau ;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur ;

Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient couler à coups de trique
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets !

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
- Est-ce en ces nuits sans fond que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future vigueur ? -

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesses, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leurs sillages aux porteurs de cotons,
Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons
Revenir en haut Aller en bas
Le Gardien
Pirate des 7 mers (ADMIN)
Pirate des 7 mers (ADMIN)
Le Gardien


Masculin
Nombre de messages : 3367
Age : 1012
Localisation : Sur les toits...
Loisirs : Vous surveiller !!!
Date d'inscription : 18/12/2006

Le bateau ivre - Rimbaud Empty
MessageSujet: Re: Le bateau ivre - Rimbaud   Le bateau ivre - Rimbaud Icon_minitimeMer 24 Mar - 17:32

Une bien jolie poésie que je ne connaissais pas... Le bateau ivre - Rimbaud Icon_smile

Merci pour cette lecture très agréable .

Le Gardien
Revenir en haut Aller en bas
https://sourcedepoesie.1fr1.net
Phileau
Marin d'eau douce



Masculin
Nombre de messages : 18
Loisirs : Poésie Photographie Théâtre
Date d'inscription : 17/03/2010

Le bateau ivre - Rimbaud Empty
MessageSujet: Re: Le bateau ivre - Rimbaud   Le bateau ivre - Rimbaud Icon_minitimeJeu 25 Mar - 10:16

C'est avec celui-ci que j'ai découvert et appris la poésie ! Le bateau ivre - Rimbaud Icon_wink
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Le bateau ivre - Rimbaud Empty
MessageSujet: Re: Le bateau ivre - Rimbaud   Le bateau ivre - Rimbaud Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Le bateau ivre - Rimbaud
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Ophélie de Rimbaud
» Lettre de Rimbaud
» je suis ivre
» Ophélie (Arthur Rimbaud)
»  Je suis un homme ivre d’amour

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
SOURCE DE POESIE :: A la source de nos partages :: Dieux des Mers...des Vers-
Sauter vers: