C’est à toi que j’écris, toi qui ne me lira jamais ,toi que j’ai perdu car je me refusais à te laisser seul un soir de Réveillon. Et je m’en veux encore, tout en ayant conscience, que réveillon ou pas, tu détestais la solitude.
Combien de fois partant en courses, t’ai-je trouvé , allongé sur le dos, au milieu du couloir, me suppliant des yeux de ne pas t’abandonner, même pour une heure.
Et combien de fois ai-je pesté te parlant comme à un enfant, t’expliquant bien inutilement que je ne serais pas longue et qu’il faisait un temps à ne pas mettre un chien en voiture.
Et je cédais souvent, rien que pour voir le soulagement dans ton regard, t’observant en souriant glisser comme un fou sur le carrelage , à la recherche d’une laisse que tu ramenais fièrement dans ta gueule , la queue battant l’air.
Je revivais alors ce que j’avais vécu, au temps béni où les enfants étaient petits , endormis dans la voiture où il faisait toujours ou trop froid ou trop chaud. J’expédiais alors les achats les réduisant à l’essentiel en grommelant pour la forme.
Et nous revenions alors tous deux , les yeux fixés sur une route que tu connaissais par cœur.
Pourquoi n’es tu pas revenu ? Es tu encore vivant?
Si tu savais combien j’ai pu maudire ces jeunes inconscients et leurs pétards, qui t’ont effrayé alors que tu t’apprêtais à monter en voiture, sans la laisse que nous t’enlevions toujours pour le parcours. Tu es parti comme un fou dans la nuit noire, courant si vite , qu’il fut impossible de te localiser. Et nous t’avons cherché des heures durant, Inquiets, mais persuadés que nous te retrouverions.
Il faisait si froid en Janvier, que nos nuits blanches nous les passions à t’imaginer tremblant et tapi dans un coin, affamé, apeuré et perdu. Des semaines durant, la torche à la main , nous avons fouillé les endroits les plus inaccessibles , promené inquiets nos regards sur l’eau des rivières. Chaque sortie était un nouvel espoir, chaque rentrée sans toi, un crève-cœur…………
Ces instants d’inquiétude m’ont fait prendre la mesure de mon amour pour toi.
Ton maître travaillant, j’ai contacté les vétérinaires, les salons de toilettage, j’ai collé des centaines d’affichettes, parcouru autant de kilomètres, questionnant et rencontrant parfois l’incompréhension : « Quoi tout ce foin pour un chien, mais ma brave dame, prenez en un autre, à l’heure qu’il est il est loin, mort, adopté………………
Peut être es tu loin en effet, adopté, je le crois, mort……….. je le saurais.
J’ai alors proposé un récompense et reçu des appels pour des chiens te ressemblant, des coups de téléphone donnés le soir tard, par de petits farceurs inconscients du mal qu’ils faisaient.
De pauvres bichons désireux de prendre l’air sans leur maitre se sont fait poursuivre, par quelques uns plus tentés par l’argent que par le fait de te rendre aux tiens.
Des personnes m’ont même proposé de me donner leur chien, pur race, parce qu’ils déménageaient . Je ne te remplacerai pas, onze mois ont passé et je t’attends encore.
Dans le jardin sous la haie, j’ai laissé tes jouets en plastique et ta balle. Ton panier , est dans la véranda.
J’ai toujours dans la tête ton arrivée dans notre famille, il y a cinq ans de cela, dans le blouson de notre ainé.
Cadeau de Noël à l’avance, puisque tu était sevré; tu avais juste la truffe qui dépassait et des yeux si craquants, que moi qui ne voulait pas de fil à la patte ( en l’occurrence les tiennes ) j’ai senti mon cœur s’emballer quand je t’ai serré contre moi; Tu quittais tout juste ta mère, tes frères et sœur, mais tu t’es senti de suite chez toi, reniflant , visitant chaque coin , pour revenir ensuite fièrement chercher les caresses, que nous distribuions sans compter tant nous t’aimions déjà .
Nous t’emmenions dans toutes nos randonnées, vacances ou sorties. Docile tu te glissait sous une table, attendant que nous terminions,
Tu adorais les ballades dans la neige, et les bords de mer. Mais que n’aimais tu pas? Ton bonheur était de nous accompagner. Notre joie à nous , était de te voir profiter de tes jeunes années de chien.
Si tu savais comme tu me manques ! …le sauras-tu jamais ?
Dans mes promenades matinales et solitaires, passer où nous allions m’attriste, croiser d’autres chiens avec leurs maitres me fend le cœur. J’ai visité tant de sites animaliers, vu tant de chiens aux yeux tristes dans des box trop petits et inconfortables, que je suis devenue amère. Il y a tant d’animaux à l’adoption, pourquoi te garder loin de nous ? La facilité , des enfants attendris et suppliants….les hypothèses sont aussi nombreuses que mes coups de blues et mon incompréhension. Et je me dis qu’à cause de tout cela , tu penses peut être dans ta tête de chien, que nous t’avons abandonné.
Es tu heureux ma petite gueule , es tu bien soigné, nous as-tu oubliés…. m’as-tu oubliée ? Moi qui voulais attendre d’être plus âgée pour avoir un chien, je vieillirai sans toi, et tu partiras peut être un jour sans que nous le sachions. Sans que nous ayons la moindre idée de la vie qui fut la tienne , loin de ton premier foyer, entouré de l’affection de tous ceux qui attendent encore , malgré l’espoir qui s’amenuise, ton retour.
Bien sûr je fais des heures d’emplettes sans me soucier de rentrer vite, mais devant la maison instinctivement , je te cherche la truffe collée contre la vitre du salon ,excité par mon retour, ta queue s’agitant en guise de bienvenue.
Je t’aime ma touffe de poils, mais je n’ai aucun moyen de te le faire savoir.
REVIENS………………………………
Ta maitresse……….j’ose encore le croire