Elle approcha le livre de son visage, fit défiler les pages sous son pouce et les yeux fermés le respira..
Tous les livres qu’elle avait aimés lui revenaient soudain…Des mots, des phrases, les images qu’elle s’en était faites. Leurs textures sous ses doigts. La forme, la taille des caractères, l’odeur des encres, la hardiesse ou la naïveté des illustrations. Elle se trouvait là, seule, chavirée par un étrange sentiment.
Elle se souvenait comme parfois atteindre le mot « fin » la laissait vide, comme orpheline lorsqu’elle était entrée en lecture, comme on entre dans une belle histoire, qu’on en épouse les personnages jusqu’à parfois s’identifier à eux.
Au chapitre I, les mots semblaient jouer à saute-mouton. Elle fronçait les sourcils et tentait en vain d’immobiliser les phrases pour en saisir le sens. Vite agacée, les yeux fatigués par cet exercice, elle reposa rageusement le livre, bien décidée à l’abandonner sur le guéridon.
Elle se leva, se fit un expresso. Le café mousseux dans sa tasse et l’odeur du café la firent sourire. Sa journée bien qu’ordinaire avait été douce, sans accroc.
Appuyée le dos contre l’évier, son regard fut attiré par le livre laissé au salon. Elle le regardait, intriguée. Alors que toutes les fenêtres étaient bien fermées, qu’aucun courant d’air ne traversait la pièce, elle vit se soulever la couverture, puis les pages une à une et le livre s’ouvrir, béant.